jeudi 28 octobre 2010

Les amours imaginaires



Trois personnages : Marie, Francis et Nicolas. Les Amours Imaginaires, seconde réalisation du tout jeune metteur-en-scène-scénariste-monteur-acteur québécois Xavier Dolan, s’apparente à une toile de fond sur laquelle les liens entre le trio de protagonistes se dessinent progressivement - de la marque d’une complicité apparemment inébranlable à l’esquisse d’une rivalité douloureuse et destructrice -, s’entremêlent, se tissent solidement et se délient irrémédiablement. Mais ne s’agit-il pas d’un duel amoureux, plutôt que d’un trio ?

Marie et Francis, deux amis de toujours, succombent tous les deux au charme de Nicolas lors d’une soirée. Ravis de partager le même amour au début, Marie et Francis vont imperceptiblement déchirer et mettre à mal leur amitié, à force de mesquineries guidées par une jalousie de plus en plus vive.

Si le beau Nicolas au sourire charmeur, aux bouclettes dorées et à l’allure angélique séduit dès le premier regard, le personnage idolâtré et trop idéalisé se révèle finalement assez inconsistant, incapable de saisir, de percevoir, ni même de voir les sentiments ardents de ses nouveaux compagnons dont le désir, nourri par l’admiration de cet être à la beauté insolente, ne cesse de croître et finira par faire éclater les liens déjà fragilisés qui les réunissaient tous les trois. Des amours leurrées par la figure d’un personnage relativement vide, que Marie et Francis détournent sur des amants de passage, dupés par leurs sentiments, des amours factices, imaginaires, des non-dits qui en disent peut-être beaucoup à la réflexion… Le personnage de Nicolas n’est-il pas un prétexte à l’amour inavoué des deux amis ?

L’aveu de l’amour brûlant qu’ils portent tous deux à Nicolas ne sera avoué que tardivement, les personnages étant la plupart du temps passifs, comme figés dans le désir. Marie notamment, semble de glace, dans ses robes parfaitement lisses et à la coupe droite, les cheveux impeccablement tirés en chignon, l’allure et le mode de vie « vintage », peut-être archaïque, en retard sur son temps. L’esthétique du film, à couper le souffle, participe également à cette impression d’absence d’authenticité, de sincérité : l’abondance des ralentis, des gros plans, des prises longues, le traitement de la lumière, les couleurs si vives, dépeignent une atmosphère polie, calfeutrée, presque surannée. Cette beauté plastique irréprochable fait écho aux relations platoniques, que l’on n’ose effleurer, des personnages.

La subtilité avec laquelle Xavier Dolan traite un sujet aussi risqué et l’audace de la mise en scène qui n’est pas sans rappeler les caractéristiques de la Nouvelle Vague, happent et envoûtent du début à la fin du film, qui ne laisse pas indifférent, tant l’originalité le démarque des autres qui lui sont contemporains. On attend avec impatience les prochaines réalisations du cinéaste, porteur d’un vent frais, (symbole d’une nouvelle génération ?) !

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